La malédiction de la connaissance
La malédiction de la connaissance est un biais cognitif qui nous pousse à croire que les autres possèdent les mêmes informations ou compétences que nous. Ce phénomène se manifeste autant dans le monde du travail que dans le domaine de l'éducation, où il peut rendre plus difficile la compréhension et l’apprentissage.
La malédiction de la connaissance : une barrière à la transmission des savoirs
La malédiction de la connaissance survient lorsque nous oublions ce que c’est que de ne pas savoir quelque chose. Cette difficulté à se mettre à la place d’une personne ayant moins de connaissances sur un sujet fait en sorte que l’on va parfois donner des explications qui sont vagues ou incomplètes. Cela pose évidemment problème dans des contextes où la communication claire est essentielle, comme dans le milieu professionnel ou l’éducation.
Dans une expérience, des personnes devaient taper une chanson avec leurs doigts et prédire si les autres reconnaîtraient la mélodie. Celles qui devaient taper la chanson pensaient que la moitié du groupe devinerait correctement, alors que seulement 2,5 % ont réussi [1]. Pourquoi ? Parce que les cobayes qui devaient taper « entendaient » la mélodie dans leur tête et supposaient que les autres percevraient la même chose. Le fossé entre ce que nous savons et ce que les autres savent est donc le centre du problème.
Un frein à l’apprentissage
Dans le domaine de l’éducation, la malédiction de la connaissance est particulièrement problématique [2]. Les profs sont souvent spécialistes dans leur domaine et peuvent oublier à quel point les concepts enseignés peuvent être complexes pour leur classe. Par exemple, un professeur de mathématiques pourrait sauter des étapes dans une démonstration en pensant qu'elles sont évidentes alors qu’elles ne le sont pas du tout pour les personnes étudiantes.
Plus concrètement, la malédiction de la connaissance dans l’enseignement peut se répercuter de plusieurs manières :
L’utilisation de langage abstrait ou technique sans explication suffisante;
Des transitions floues entre des concepts connexes ce qui ne permet pas aux personnes étudiantes de faire des liens entre ceux-ci;
La présentation de détails trop complexes et trop nombreux, ce qui nous éloigne en quelque sorte des idées principales [3].
Pour les personnes venant de milieux culturels ou éducatifs variés, la malédiction de la connaissance peut amplifier les inégalités. Par exemple, une enseignante qui suppose que l’ensemble de ses élèves partagent les mêmes références ou connaissances de base risque d’exclure les personnes qui ont un parcours différent.
Stratégies pour surmonter la malédiction de la connaissance en éducation
Rendre les choses simples : Diviser les informations complexes en petites parties faciles à comprendre permet de présenter le contenu de manière claire.
Surprendre pour capter l’attention : Ne suppose pas que ton contenu intéressera automatiquement ton public. Capte leur attention en montrant pourquoi le sujet est intéressant et utile.
Utiliser des exemples concrets : Illustre tes explications avec des exemples pratiques et encourage ton public à en donner également.
Donner du sens au contenu : Propose des activités comme des projets ou des résolutions de problèmes pour connecter les idées théoriques à des situations réelles.
Prendre en compte les émotions : Reconnais que le processus d’apprentissage peut être complexe et frustrant à certains moments. Crée un environnement où toutes les personnes se sentent soutenues face à ces défis.
Raconter des histoires : Intègre des anecdotes ou des récits qui rendent les concepts plus accessibles et mémorables. Cela aide aussi à maintenir l’attention.
Des parallèles avec le monde du travail
Les défis posés par la malédiction de la connaissance dans l’éducation trouvent écho dans le milieu professionnel. Dans les deux cas, la transmission efficace des informations est essentielle pour éviter des erreurs et permettre une collaboration efficace entre toutes les équipes de travail.
Par exemple, les personnes qui débutent à un nouvel emploi, tout comme les personnes étudiantes, doivent acquérir rapidement des connaissances qui peuvent être parfois assez complexes. Une formatrice ou un gestionnaire qui suppose que les bases sont déjà connues risque de les perdre en chemin. Il est donc important d’adapter son discours à son public et les équipes d’une entreprise doivent aussi éviter les jargons internes, comme les abréviations et les sigles, lorsqu’elles collaborent avec des partenaires pour qui ce vocabulaire est moins familier.
Conclusion
La malédiction de la connaissance est une barrière qui peut rendre très difficile la communication et l’apprentissage. Dans le domaine de l'éducation, elle peut freiner la progression en plus de renforcer les inégalités. Dans le monde du travail, elle rend plus difficile la collaboration avec les partenaires et l’inclusion des talents.
Cependant, comme tous les autres biais, la malédiction de la connaissance n’est pas une fatalité! On peut adopter certaines pratiques assez faciles, comme simplifier notre langage, utiliser des exemples concrets et vérifier régulièrement la compréhension de notre auditoire. Tout ce la permet de rendre nos interactions plus efficaces.
À bientôt!
Sarah
Références :
[1] : Heath, C. et Heath, D. (2006, décembre). La malédiction de la connaissance. Harvard Business Review. https://hbr.org/2006/12/the-curse-of-knowledge
[2] : Froyd, J. et Layne, J. (2008, octobre). Faculty development strategies for overcoming the "curse of knowledge". In 2008 38th Annual Frontiers in Education Conference (pp. S4D-13). IEEE.
[3] : Leddy, C. (2012, 8 novembre). Exorcising the curse of knowledge. The Harvard Gazette. https://news.harvard.edu/gazette/story/2012/11/exorcising-the-curse-of-knowledge/