Agir ou s'abstenir : comprendre le biais d'omission
Le biais d'omission est un concept psychologique qui influence nos décisions quotidiennes, et ce, sans qu'on s'en rende compte (comme tous les autres biais!). Ce biais se manifeste lorsqu'on a tendance à juger moins sévèrement le fait de ne rien faire plutôt que de prendre des initiatives, même dans des situations où agir serait plus judicieux. Selon une méta-analyse, ce comportement peut avoir un impact profond sur nos jugements et nos décisions dans des domaines aussi variés que la santé publique, la politique sociale et même le sport! Cela peut être attribué à des facteurs tels que l'inertie psychologique, la perception des coûts de transaction et la croyance que les actions sont plus causales que les non-actions. (1)
Les facteurs qui influencent ce biais
Le biais d'omission est influencé par la notion de responsabilité sociale de la personne qui doit prendre une décision. Aussi, on remarque que ce biais est moins prononcé lorsque la personne a une responsabilité sociale claire envers quelqu'un ou quelque chose. Par exemple, les personne qui travaillent dans le domaine de la santé (et qui ont une responsabilité claire envers leur clientèle!) et qui doivent décider de donner un traitement ou non, seront moins susceptibles de succomber au biais d'omission en raison de leur grande responsabilité sociale et professionnelle. (2)
En revanche, si une personne n'a pas de responsabilité claire, celle-ci pourrait être plus encline à ne rien faire et à juger que son inaction est acceptable ou moins problématique. Dans ce cas, le biais d'omission est plus fort parce que la personne ne se sent pas spécifiquement responsable de l'autre. (2)
Donc, quand on est responsable d'une personne ou de quelque chose, on est plus susceptible de prendre des actions nécessaires pour régler la situation et à voir l'inaction comme quelque chose de négatif. Quand cette responsabilité est floue, on est plus susceptible de ne rien faire et de trouver cela moins grave.
Une personne peut-elle être biaisée lorsque la décision l'affecte personnellement?
Oui, et c'est même pire!
En effet, le biais d'omission est présent indépendamment de si la décision affecte l'individu lui-même ou une autre personne. Par contre, on remarque que le biais est plus fort lorsque la décision affecte l'individu directement. Cela signifie que les gens sont plus enclins à choisir l'inaction lorsque la décision les concerne personnellement. (3)
Les conséquences sociales
Un groupe de recherche a exploré comment ce biais s'étend aux jugements moraux. Dans une de leurs études, on y présente le cas de John, un joueur de tennis qui, connaissant l'allergie alimentaire de son adversaire, décide de lui recommander un aliment contenant l'allergène pour l'affaiblir, comparé à une situation où il ne fait rien alors que son adversaire commande l'aliment en question. L'étude révèle que les actions de John sont jugées plus immorales lorsqu'il agit activement pour nuire, plutôt que lorsqu'il omet de prévenir, alors que les conséquences sont les mêmes. (4)
Le biais d'omission n'est pas limité aux laboratoires de recherche. Dans le monde réel, il se manifeste de manière frappante, comme le montrent les statistiques de la NBA, où les arbitres ont tendance à appeler 50 % moins de fautes dans les moments décisifs des matchs serrés. De même, ce biais affecte des décisions cruciales en matière de santé publique. Un exemple notoire est celui des parents qui choisissent de ne pas vacciner leurs enfants par peur des effets secondaires rares, bien que les risques de ne pas vacciner soient statistiquement plus élevés pour la santé de l'enfant. (4)
Le biais d'omission et l'EDI
Dans le contexte de l'EDI, le biais d'omission peut avoir des conséquences importantes. Par exemple, les gestionnaires ou les membres de la direction peuvent inconsciemment favoriser le statu quo ou éviter des actions nécessaires pour corriger les inégalités, simplement parce que l'inaction est psychologiquement moins lourde à porter. En prenant conscience de ce biais et en travaillant à le surmonter, on peut faire avancer notre société vers plus d'équité, de diversité, et d'inclusion puisque la lutte pour une société juste consiste à combattre les inégalités existantes, mais surtout à changer les façons de penser qui les maintiennent.
Quels sont les énoncés qui te surprennent le plus?
À bientôt!
Sarah
Références :
1-Yeung, S. K., Tijen, Y., & Feldman, G. (2022). Action and Inaction in Moral Judgments and Decisions: Meta-Analysis of Omission Bias Omission-Commission Asymmetries. Personality and Social Psychology Bulletin, 48(10), 1499-1515. https://doi.org/10.1177/01461672211042315
2- Haidt J., Baron J. (1996). Social roles and the moral judgement of acts and omissions. European Journal of Social Psychology, 26, 201–218. Crossref
3- Zikmund-Fisher B. J., Sarr B., Fagerlin A., Ubel P. A. (2006). A matter of perspective: Choosing for others differs from choosing for yourself in making treatment decisions. Journal of General Internal Medicine, 21(6), 618–622. Crossref
4- Spranca M., Minsk E., Baron J. (1991). Omission and commission in judgment and choice. Journal of Experimental Social Psychology, 27, 76–105. Crossref